Utilisations de l’arachide
L’arachide est utilisée dans divers secteurs et sous différentes formes. Le tableau 5 illustre les plus courants (SN, 2010a).
Secteurs | Utilisations |
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Alimentation humaine
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Alimentation humaine
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Alimentation animale |
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Agriculture |
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Industries |
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Pharmaceutique |
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Traçabilité et gestion du risque allergène dans l’agroalimentaire
La traçabilité est « la capacité de retracer le cheminement d'un produit, à travers toutes les étapes de la production, de la transformation et de la distribution. » (S.N., 2003a). Elle permet d’identifier toutes les étapes de la production d’un produit et s’avère utile lorsque par exemple un produit est dangereux ou défectueux.
Lorsque l’analyse du risque met en évidence la possibilité qu’un allergène caché soit présent, la priorité reste de réduire ce risque au minimum en mettant en place les procédures nécessaires. En dernier recours, l’étiquetage préventif sera utilisé comme stratégie afin d’informer le consommateur, mais également afin de protéger l’entreprise.
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Détection des allergènes
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Influence des procédés technologiques qur le potentiel allergique
Les technologies utilisées dans les procédés agroalimentaires peuvent influencer l’allergénicité des produits. Deux cas sont envisageables (Eurasanté, 2004b) : le premier concerne des modifications intervenant au cours du stockage, du chauffage ou des procédés physico-chimiques (action des acides, des protéases ou de la température entraînant des modifications dans la structure de la protéine). L’épitope allergène masqué peut dès lors être rendu accessible aux lymphocytes du système immunitaire. La seconde influence est le recours de plus en plus systématique à des additifs de protéines purifiées pouvant être allergisantes (ex : hydrolysats de protéines utilisées en tant qu’arômes, huiles végétales, protéines végétales de graines, agents texturants, bactéricides, etc.).
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L’allergie à l’arachide est une allergie de type I, aussi appelée allergie IgE-médiée ou IgE dépendante ou encore hypersensibilité immédiate. Les protéines de l’arachide identifiées comme allergènes sont des protéines reconnues par les IgE des patients allergiques à l’arachide. Deux phases caractérisent cette allergie : une phase précoce (qui survient dans les minutes après l’exposition) et la phase tardive (qui survient 4 à 6 heures après). Par ailleurs, l’allergie à l’arachide survient plus fréquemment chez les enfants que dans la population adulte (Pansare, M. and Kamat, D., 2009a).
Prévalence
Ces 30 dernières années, la prévalence de l’allergie à l’arachide semble avoir augmenté dans les pays développés. On parle d’un passage de 1 cas sur 10 000 à 1 cas sur 200 (Boulay, A. et al., 2008a; Tariq, S.M. et al., 1996). Les auteurs mettent cependant en garde car ils constatent un manque d’uniformisation des données sur le sujet, rendant difficile la comparaison des études. On peut cependant dire que cette allergie touche environ 1% des enfants en-dessous de 5 ans. Cette allergie est plus fréquente chez les enfants que chez l’adulte, raison pour laquelle il existe plus d’études portant sur les enfants.
Prévalence | Population (n) | Méthode(100g) | Pays | Référence de l'étude |
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Objectivée | ||||
22.4% (parmi les sujets sensibilisés) |
Enfants (110) (âge : 8 ans) |
Histoire, tests cutanés, dosage IgE, provocation orale |
Suède | Nicolaou, N. et al., 2010 |
1,63 | Enfants (5161) (moyenne d’âge : 7 ans) |
Histoire, tests cutanés, dosage IgE, DBPCFC |
Canada | Ben-Shoshan, M. et al., 2009 |
1,8 | Enfants (1072) (âge : 4 à 5 ans) |
Histoire, tests cutanés, provocation orale |
Angleterre | Hourihane, JO et al., 2007 |
1,5 | Enfants (4339) (école primaire) |
Histoire, tests cutanés, dosage IgE, DBPCFC |
Canada | Kagan, R.S. et al., 2003 |
1,5 | Enfants (1246) (3 à 4 ans) |
Histoire, tests cutanés, provocation labiale, provocation orale |
Angleterre | Grundy, J. et al., 2002 |
Hypersensibilité : Enfants=0.2% et adultes=0.4% |
Familles (595) : Enfants de 3 ans (486) et adultes (936) |
Histoire, tests cutanés, dosage IgE, provocation orale libération histamine |
Danemark | Osterballe, M et al., 2005 |
Déclarée | ||||
0.5-1% | Enfants et adultes | Questionnaire | (méta-analyse) | Rona, R. et al., 2007 |
0.6% dans la population générale (enfants=0.8% et adultes=0.6%) |
Ménages (13 493 pers.) |
Questionnaire | Etats-Unis | Sicherer, S.H. et al., 2003 |
Prévalence objectivée
Une récente étude suédoise a étudié l’allergie à l’arachide chez les enfants (Nicolaou, N. et al., 2010). Il s’agit d’une cohorte d’enfants, sélectionnés avant leur naissance (1085) et revus à l’âge de 8 ans (1029), âge auquel les tests ont été effectués (prick tests et dosage des IgE spécifiques). Parmi les 933 enfants ayant des données de prick test et/ou d’IgE spécifiques disponibles, 110 étaient considérés comme sensibilisés à l’arachide, ce qui représente une proportion de 11.8%. Septante neuf ont ensuite participé à un test de provocation orale pour préciser le diagnostic. Au final, 19 ont été classé parmi la cohorte des sujets allergiques, et 66 dans celles des sujets tolérants. Les auteurs ont estimé la prévalence de l’allergie clinique à l’arachide parmi les sujets sensibilisés à 22.4% (19 sur 85). La prévalence de l’allergie à l’arachide est donc inférieure à la sensibilisation.
Bien que certaines études montrent une augmentation de la prévalence de l’allergie à l’arachide, d’autres semblent au contraire donner des résultats stables. C’est en tout cas ce qui ressort d’une étude menée durant 5 ans sur des enfants à Montréal, via des questionnaires administrés aux parents, complétés par des tests pour confirmer ou préciser le diagnostic (Ben-Shoshan, M. et al., 2009). Parmi les 5161 répondants ayant fourni des données complètes, la prévalence était de 1.63% pour 2005-2007 contre 1.50% en 2000-2002, ce qui représente une augmentation de 0.13%, que l’on peut considérer comme relativement faible. Ces résultats suggèrent donc une prévalence stable.
En Angleterre, une étude fut réalisée sur les enfants et leurs mamans dans le but d’évaluer l’impact de l’allaitement maternel sur la prévalence de l’allergie (Hourihane, J.O. et al., 2007). Sur les 1072 enfants de la cohorte, la prévalence de l’allergie à l’arachide était de 1.8%. En comparaison, elle était de 0.6% il y a 10 ans. Cette prévalence est la plus élevée jamais enregistrée en Angleterre.
Selon une étude canadienne (Kagan, R.S. et al., 2003), la prévalence de l’allergie à l’arachide chez les enfants dépasserait 1.0%. Il s’agit d’une importante étude dont l’échantillon s’élevait à 4339 enfants fréquentant l’école primaire. La prévalence de l’allergie à l’arachide était de 1.50%. En tenant compte des données des enfants ayant répondu au questionnaire mais ayant été perdus de vue avant de passer les tests, cette prévalence monte à 1.76%. Et lorsque les auteurs ont intégré les données relatives aux non-répondants, la prévalence a pu être estimée à 1.34%.
Selon une étude réalisée en Angleterre (Grundy, J. et al., 2002), la prévalence de l’allergie à l’arachide aurait doublé chez les enfants de 3 à 4 ans : elle est passée de 0.5% à 1.0% entre 1989 et la période de 1994 à 1996. Après avoir rempli un questionnaire, ils ont tous été invités à subir des examens cliniques afin d’établir le diagnostic de l’allergie. Dans cette cohorte constituée de 1246 enfants, les auteurs ont constaté une augmentation substantielle du nombre d’allergies à l’arachide et estiment globalement sa prévalence à 1.5% chez les enfants.
Au Danemark, une étude réalisée en 1999 sur 495 familles (Osterballe, M. et al., 2005) a donné comme résultats une prévalence de l’hypersensibilité à l’arachide de 0.2% chez les enfants âgés de 3 ans et 0.4% chez les adultes. Cette étude a plus de 10 ans, et comparée aux résultats plus récents, on constate une légère augmentation de la prévalence.
Enfin, l’étude d’une cohorte belge (Mulier, S. et al., 2006) a permis de classer les allergènes selon leur fréquence dans une population d’enfants allergiques : l’œuf arrive en premier (31%), suivi des fruits à coques (18.1%). Viennent ensuite le lait de vache (16.1%), puis l’arachide (13.2%) et enfin les poissons (4.5%) et les fruits du groupe latex (4.5%). Il s’agit d’une étude rétrospective de 156 dossiers de patients présentant une allergie alimentaire IgE-médiée, dont l’âge moyen était de 26 mois. Selon les résultats de cette étude, seuls 4 allergènes sont responsables de 78.4% des réactions allergiques chez les enfants, parmi lesquels l’arachide arrive en 4ème position, ce qui représente 13.2% des enfants.
Prévalence déclarée
Rona et son équipe (Rona, R. et al., 2007) ont réalisé une méta-analyse sur la prévalence de l’allergie alimentaire. La prévalence de l’allergie à l’arachide déclarée est estimée à environ 0.5 à 1.0% dans une population d’enfants et d’adultes. Au niveau des données relatives aux hypersensibilités déclarées par les personnes allergiques, la prévalence à l’arachide varie de 0 à 2%. Au niveau de la prévalence relative aux patients ayant présenté des symptômes, les chiffres varient de 0.5 à 2.5% pour l’arachide. A propos des études menées avec des tests de provocation orale, les données sont d’environ 1.5%. Cette méta-analyse mentionne également une étude utilisant la provocation orale et estimant la prévalence de l’allergie à l’arachide chez des enfants d’âge préscolaire à 0.2%, et chez les adultes à 0.4%. Par ailleurs, les données de prévalence pour la sensibilisation aux IgE vont de moins de 1% à 6% pour l’arachide. Cette méta-analyse souligne l’hétérogénéité des études et des données, rendant complexes les comparaisons et la formulation de conclusion générale.
Une autre étude a été réalisée aux Etats-Unis en 2002 (Sicherer, S.H. et al., 2003). Elle a été menée à travers tout le pays via une enquête par téléphone et sur base d’un questionnaire standardisé. 4855 ménages ont participé à l’étude en 2002, ce qui représente 13 493 individus. Les résultats de cette enquête ont été comparés avec ceux d’une enquête identique réalisée en 1997. Il s’agissait de déterminer la prévalence auto-déclarée de l’allergie à l’arachide aux E-U, et de voir son évolution en 5 ans. En 1997, la prévalence était de 0.7% chez les adultes et de 0.4% chez les enfants de moins de 18 ans. Les résultats 5 ans plus tard soulignent une augmentation de cette prévalence chez les enfants (de moins de 18 ans) entre 1997 et 2002, alors qu’elle ne semble pas avoir augmenté chez les adultes durant cette même période. Le pourcentage a en effet doublé chez les enfants et est passé de 0.4% à 0.8 %, avec un taux plus élevé dans la population la plus jeune. La prévalence dans la population générale semble cependant être restée stable (0.6%).
Les causes de l’apparente augmentation de la prévalence de l’allergie à l’arachide ne sont pas claires. De nombreux facteurs pourraient intervenir (Pansare, M. and Kamat, D., 2009b), comme par exemple l’augmentation de la consommation de cette légumineuse, l’exposition à des produits non-alimentaires contenant de l’arachide, etc. De plus, la revue de la littérature réalisée par EuroPrevall (Boulay, A. et al., 2008c) a montré que la prévalence de l’allergie à l’arachide varie en fonction de la situation géographique. L’allergie à l’arachide est fréquente aux USA et en France, alors qu’elle est rare (ou mal identifiée) en Asie et en Afrique. Ceci s’expliquerait entre autres par des différences au niveau génétique et/ou environnemental.
Par ailleurs, au vu des difficultés d’uniformisation des données et étant donné les différences entre les chiffres de prévalence, certains auteurs estiment que la tendance actuelle est à l’exagération. En effet, les études récentes ne montrent pas d’augmentation significative de la prévalence.
Allergénicité
Définition
L’allergénicité est la propriété d’induire une réponse immunitaire. Dans le cas des allergies alimentaires, et par rapport à l’allergène en lui-même, elle est fonction de plusieurs paramètres : la quantité d’allergène, sa résistance à la chaleur, sa résistance aux sucs gastriques et son hydrosolubilité.
Deux processus majeurs influencent cette propriété : le chauffage (la cuisson) et la digestion. Les conséquences relatives au chauffage seront abordées dans le chapitre 4. En ce qui concerne la digestion, il faut être bien conscient que l’allergène n’est jamais ingéré seul. Il est compris dans une matrice alimentaire complexe, un aliment ou une préparation (Blanc, F., 2008). C’est cet ensemble qui est ingéré et digéré. Ainsi, la composition de la matrice alimentaire influence le processus digestif : la digestion des protéines d’arachide est ralentie lorsque ces dernières sont ingérées en présence de certains polysaccharides (Grimshaw, K.E. et al., 2003). La quantité de lipides présents dans le bol alimentaire semble également influencer l’allergénicité.
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Sensibilisation
L’allergie apparaît généralement chez des personnes atopiques : 80.3% des personnes allergiques ont une atopie familiale (Mulier, S. et al., 2006). La sensibilisation peut être induite directement par un allergène alimentaire, ou indirectement par réactivité croisée avec un autre allergène, comme par exemple un aéroallergène.
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Voies de contact avec l’allergène
L’ingestion représente la voie de contact avec l’allergène dans 91% des cas. C’est ce qui ressort d’une étude française sur 142 patients (Moneret-Vautrin, D.A. et al., 2001). C’est aussi la voie ayant entraîné les réactions les plus sévères. Il semblerait en effet que les protéines doivent être ingérées pour produire une réaction allergique systémique (Burks, A.W., 2008b). Dans les autres voies, on retrouve aussi le contact cutané (8%) et l’inhalation ou voie aéroportée (1%), mais de façon beaucoup moins fréquente que l’ingestion.
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Tableau clinique et symptômes
Les manifestations de l’allergie alimentaire, et plus particulièrement dans le cas de l’allergie à l’arachide, peuvent être diverses et peuvent aller de l’urticaire au choc anaphylactique, voire même entraîner la mort. Ces symptômes apparaissent dans les secondes qui suivent l’ingestion et jusqu’à 2 heures après (Burks, A.W., 2008a). Ils affectent plusieurs systèmes d’organes tels que le système cutané, respiratoire, cardiovasculaire, gastro-intestinal, neurologique et/ou oculaire. Ils se manifestent notamment par un prurit, de l’urticaire, un œdème de Quincke3, des vomissements, des diarrhées, des crampes abdominales, des difficultés respiratoires, de l’hypotension, et peuvent aller jusqu’au coma. Les symptômes cutanés sont les plus courants et apparaissent dans plus de 80% des cas.
Les symptômes peuvent se présenter de façon isolée, bien que le plus souvent plusieurs organes soient touchés simultanément. L’allergie à l’arachide est caractérisée par des symptômes plus sévères que dans le cas d’autres allergies alimentaires, ainsi que par un degré élevé de réaction pour un faible contact (Hourihane, J.O. et al., 1997). Les symptômes sévères semblent plus fréquents chez l’adulte que chez l’enfant.
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Prévention
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Histoire naturelle
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Diagnostic
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Dose ou seuil réactogène
La dose réactogène ou seuil réactogène est « la dose minimale d’aliment qui peut déclencher une réaction chez un individu allergique » (AFSSA, 2008). L’eliciting dose est la plus petite dose induisant des symptômes subjectifs convaincants. La méthode de référence reste le test de provocation par voie orale en double aveugle, ou DBPCFC (double-blind placebo-controlled food challenge). Ce test permet non seulement de déterminer la plus petite dose ayant entraîné une réaction chez des patients allergiques, mais également la plus petite dose qui n’a pas enclenché de réaction, mesure importante pour les industriels. Car de nombreux aliments contiennent de l’arachide, qu’elle soit utilisée en tant qu’agent de texture ou de saveur, ou bien suite à une contamination de la chaîne de production. Cependant, il est important de bien être conscient que les patients présentant une forte réactivité et ayant déjà des antécédents de choc anaphylactique sont exclus de ces études pour des raisons qui semblent évidentes. On peut donc supposer que les doses provoquant une réaction allergique chez les patients testés seraient encore plus faibles chez des patients à haut risque. Ajoutons à cela le problème du manque de standardisation de cette méthode, facteur important dans la détermination de ces seuils, de même que le nombre de patients participant aux études, souvent trop faible que pour permettre une généralisation des résultats.
La détermination du seuil dépend de l’interaction entre l’aliment et le consommateur, et plus précisément de l’allergène (type, dose…), de la matrice alimentaire (cuisson, aliment composé, quantité de lipides…), des caractéristiques individuelles (âge, poids, prédisposition…) et de l’état du consommateur (infection, stress, activité physique, fatigue, alcool, médicaments…). La variabilité est donc le plus grand obstacle pour la détermination d’un seuil réactogène dans les aliments à un niveau individuel mais également au niveau de la population.
En ce qui concerne l’arachide, les doses réactogènes sont plus faibles que pour d’autres allergènes. Il existe cependant une grande variabilité entre individus : les quantités induisant une réaction peuvent être parfois très faibles, de quelques microgrammes chez certains individus, alors que plusieurs grammes sont nécessaires chez d’autres patients pour qu’il y ait réaction allergique.
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Réactions / allergies croisées
La réactivité croisée entre allergènes est due à la similarité de leurs structures, voire à la présence d’allergènes communs, de structures identiques. L’allergène primaire est la source de la sensibilisation, et les autres allergènes sont appelés allergènes croisant.
La majorité des réactions croisées se produisent avec des aliments du groupe des fruits à coques, comme les noix, l’amande, la pistache, la noisette, la noix de Pécan, la noix de Cajou, la noix de Macadamia ou la noix du Brésil. Il s’agit souvent de réactions suite à des contaminations de la chaîne alimentaire. Ces réactions croisées sont dues à la présence d’allergènes similaires dans ces différents aliments : ils font partie de la famille des vicillines. Il s’agit d’Ara h 1 pour l’arachide, de Jug r 2 pour la noix et de Cor a 11 pour la noisette (Barre, A. et al., 2008).
Au sein de la famille de l’arachide, les légumineuses, il existe des allergies croisées avec le lupin. Elles sont particulièrement importantes du fait de leur gravité, la réaction au lupin se manifestant souvent par une réaction anaphylactique. Le lupin a été introduit dans nos pays dans les années 1990 et sa farine est utilisée principalement comme substitut ou additif d’autres sortes de farines, comme la farine de blé ou la farine de soja. Le nombre de cas de réaction allergique suite à l’ingestion de lupin n’a cessé d’augmenter depuis son introduction dans notre alimentation. Et bien que cet aliment ait été ajouté dans la liste des ingrédients à mention obligatoire sur l’étiquetage (voir chapitre 5), beaucoup de patients allergiques et de personnel médical ignorent encore le potentiel allergique des graines de lupin et les conséquences graves que leur ingestion peut avoir (Jappe, U. and Vieths, S., 2010).
En 2009, une étude a été réalisée en France et en Belgique sur 5 366 patients (Gayraud, J. et al., 2009). Parmi les 2 680 enfants, 11.15% présentaient une allergie à l’arachide, parmi lesquels 17.1% avaient une réactivité croisée avec le lupin. Parmi les 2 686 adultes, le diagnostic de l’allergie à l’arachide a été fait pour 1.86% d’entre eux, parmi lesquels 14.6% présentaient une allergie croisée au lupin. Cette étude montre donc une fréquence relativement élevée des réactions croisées entre l’allergie à l’arachide et celle au lupin, que ce soit chez l’enfant ou à l’âge adulte. Ceci ne fait que confirmer les résultats d’une étude anglaise de 2008 (Shaw, J. et al., 2008), qui a montré qu’une faible proportion (4%), mais cependant significative, d’enfants allergiques à l’arachide présentaient également une allergie au lupin. Le diagnostic a été établi par prick tests, complété pour certains patients par un test de provocation.
Toujours dans la famille des légumineuses, les allergies croisées entre l’arachide et le soja ou le pois existent mais sont moins fréquentes. Une étude de cohorte prospective (Koplin, J. et al., 2008) a montré l’absence d’une causalité entre la consommation de soja et la sensibilisation à l’arachide. Cette dernière résulterait plutôt d’une consommation de « lait » de soja durant la petite enfance (suite à des antécédents personnels ou familiaux d’allergie au lait de vache). Ceci est cependant à l’opposé des résultats d’une étude plus ancienne (Klemola, T. et al., 2005), qui conclut en disant que l’utilisation d’une formule au soja durant les deux premières années de vie n’augmente pas le risque de développer des antigènes IgE spécifiques à l’arachide. Cette étude portait sur 170 enfants présentant une allergie au lait de vache et nourris au « lait » de soja ou équivalent.
On constate également une sensibilisation concomitante entre l’allergie à l’arachide et l’allergie au pollen de bouleau. Cependant, le diagnostic de cette allergie croisée n’est pas évident, notamment à cause des difficultés d’interprétation des tests d’IgE spécifiques du fait de la similitude structurelle des deux allergènes. Les résultats d’une étude de cohorte ont été publiés tout récemment (Asarnoj, A. et al., 2010). Cette étude a été réalisée à Stockholm en Suède, sur 4089 enfants nés entre 1994 et 1996. Les tests cliniques (dont le dosage des IgE) ont été réalisés à 4 et 8 ans, sur 1928 enfants. La constatation la plus importante de cette étude est que les enfants d’âge scolaire sensibilisés à la fois à l’arachide et au pollen de bouleau rapportent des symptômes à l’arachide significativement moins souvent que ceux sensibilisés à l’arachide mais pas au pollen de bouleau. De plus, ils rapportent aussi des symptômes plus bénins. En d’autres termes, les enfants sensibilisés à la fois à l’arachide et au pollen de bouleau sont moins susceptibles de déclarer des symptômes à l’arachide que des enfants sensibilisés uniquement à l’arachide (à l’âge de 8 ans). Ceci semble dû aux réactions croisées entre l’arachide et le pollen de bouleau. Par ailleurs, cela peut expliquer les taux élevés de sensibilisation à l’arachide dans des régions où les bouleaux sont des arbres communs. Ces résultats suggèrent que, dans les régions à forte présence de bouleaux et présentant une prévalence élevée de sensibilisation au pollen de bouleau, il y a un risque majeur de mal classer les individus sensibilisés à l’arachide. Une étude plus ancienne a également montré un lien entre l’allergie au pollen de bouleau et l’allergie à l’arachide. Elle a été réalisée sur 20 patients allergiques adultes (Mittag, D. et al., 2004) et les résultats suggèrent fortement un lien entre les deux allergènes homologues, Ara h 8 et Bet v 1.
Une réaction croisée semble également avoir été mise en évidence entre l’arachide et les graines d’agrumes. L’étude (Glaspole, I.N. et al., 2007) fait suite au cas d’une personne allergique à l’arachide ayant fait une réaction anaphylactique suite à l’utilisation de savon au citron. N’ayant pas accès à l’entièreté de l’article, il n’a pas été possible d’en savoir plus sur les circonstances de la réaction. Les auteurs ont étudié la réactivité des IgE et ont mis en évidence la possibilité de l’existence d’une co-sensibilisation entre l’arachide et les graines d’agrumes. Ceci se base sur leurs résultats, qui ont montré une réactivité croisée des IgE entre ces deux allergènes.
Prise en charge et traitement
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Historique et situation mondiale
L’arachide est une plante tropicale originaire d’Amérique du Sud. Peu chère et source importante de protéines, de lipides, de vitamines et de sels minéraux, elle s’est répandue à travers le monde (Europe, Asie et Afrique), et principalement aux Etats-Unis où sa consommation reste particulièrement élevée (environ 3.2 kg/an/personne) (Rancé, F., 2008b).
Les deux plus gros producteurs d’arachides sont la Chine et l’Inde. Les plus grands exportateurs sont l’Argentine, l’Inde et les Etats-Unis (Centre du Commerce International, 2009). Un peu moins de la moitié de la production mondiale est destinée directement à l’alimentation, le reste est pressé pour produire de l’huile et des tourteaux1. Les habitudes de consommation diffèrent fortement d’un pays à l’autre : les Etats-Unis conservent 60% de leur production pour la confection de produits alimentaires et n’exportent que 20% de leur production. Au contraire, l’Argentine et l’Afrique du Sud exportent plus de 75% de leur production.
Botanique
L’arachide a pour nom botanique : Arachis hypogaea (Food and Agriculture Organization, 2010). C’est une légumineuse, de la famille des papilionacées (ou fabacées), dont font également partie les pois, le soja, les lentilles, les fèves et différentes variétés de haricots. Certaines plantes font également partie de cette famille, comme par exemple le lupin, le caroubier ou la réglisse.
Bien qu’on entende souvent le contraire (surtout dans les pays anglophones), l’arachide ne fait pas partie du groupe des fruits à coque (noix, noisettes, pistaches, pignons, amandes, noix de cajou, etc.). Elle est en effet différente d’un point de vue taxonomique (Rancé, F., 2008a).
Les principaux cultivars d'Arachis hypogaea sont (Boulay, A. et al., 2008b) :
- Virginia : elle fournit la majorité de la culture nord-américaine ;
- Runner : variété qui connaît une forte croissance dans le sud-est américain ;
- Spanish : elle produit de petites graines riches en huile et est principalement cultivée dans ce but ;
- Valencia : elle fournit des petites graines, très appréciées rôties.
Le nombre de variétés est cependant largement supérieur, notamment suite aux nombreux croisements entre espèces qui sont faits afin d’obtenir les meilleures plantes
Terminologie
L’arachide est connue sous de nombreux noms. Outre son nom scientifique, Arachis hypogaea, les noms sous lesquels cet aliment est le plus souvent cité sont ceux d’arachide et de cacahuète. Cette dernière dénomination est le plus souvent utilisée pour mentionner la graine contenue dans la coque.
Il en existe cependant beaucoup d’autres, toutes faisant référence au même aliment. Voici une liste non exhaustive de ces termes (Ham Pong, A., 2007; Food and Agriculture Organization, 2010) : arachis, beer nut, cacahouette, cacahuate (Espagnol), cacahuète, goober nut, goober pea, groundnut, Manila nut, monky nut, ontjom (Indonésie), peanut, pindar, pistache de terre…
Composition nutritionnelle
L’arachide est un aliment riche en protéines (30%)2 et en lipides (environ 50%). Sa teneur en glucides s’élève à environ 7.5%. Les protéines de l’arachide, que l’on retrouve dans la plupart des légumineuses, sont des glycoprotéines appelées lectines. Elles possèdent la propriété de se lier spécifiquement avec les oligosaccharides. Cette réaction est comparable à une réaction antigène-anticorps.
L’huile extraite de l’arachide (100% lipides) se compose d’une majorité d’acides gras mono-insaturés (54%), mais également d’une quantité importante d’acides gras saturés (19.6%) et poly-insaturés (21.6%). Elle n’est pas très intéressante d’un point de vue nutritionnel étant donné la grande proportion d’acides gras saturés (contrairement aux huiles de colza, d’olive ou de tournesol) et le peu d’oméga 3 qu’elle contient.
E (kcal) | P (g) | L (g) | AGS (g) | AGMI (g) | AGPI (g) | G (g) | Fibres (g) | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Arachide | 564 | 29,8 | 48,1 | 87,5 | 7,5 | 22,1 | 7,48 | 11,7 |
Huile arachide |
900 | 0 | 100 | 19,6 | 54,5 | 21,6 | 0 | 0 |
Source : Souci, Fachmann et Kraut, « La composition des aliments.
Tableaux des valeurs nutritives. », 7e édition, 2008.)
Au niveau des bénéfices nutritionnels de l’arachide, outre ses teneurs élevées en protéines et en fibres alimentaires, il y a lieu de mentionner ses teneurs intéressantes en niacine, zinc, phosphore, magnésium, cuivre et manganèse, ainsi qu’en resvératrol et en antioxydants. Néanmoins, la graine peut également contenir des aflatoxines, substances hautement toxiques produites par un champignon, Aspergillus flavus (SN, 2010b; Food and Agriculture Organization, 2010).
Formes et sources
Alimentaires
Dans la plupart des régions du monde, l’arachide est distribuée entière (avec sa coque ou décortiquée). La méthode de préparation la plus commune est le grillage des graines. Grillées, elles sont consommées natures ou salées. Les autres principales formes sous lesquelles elle est consommée sont le beurre ou la pâte d’arachide, la farine (pour remplacer la farine de blé par exemple), l’huile, ou encore l’utilisation des protéines (University of Georgia (USA), 2010). A Taïwan, il semblerait même que l’arachide soit consommée sous forme de « lait » et de « yaourt » (SN, 2009).
Le danger de l’arachide dans la problématique de l’allergie provient de son utilisation dans la confection d’aliments composés. Sous forme cachée ou masquée, elle devient en effet une source de danger potentiel pour les personnes allergiques.
Non alimentaires
Outre l’alimentation, on peut également retrouver l’arachide dans des produits non alimentaires, tels que l’alimentation animale, l’industrie des cosmétiques, le secteur pharmaceutique et l’agriculture.
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Le présent dossier traite de l’allergie à l’arachide en approchant la problématique par divers aspects. Avant d’entrer dans le vif su sujet, il commencera par présenter quelques généralités au sujet de l’arachide, l’aliment, ses aspects botaniques, sa composition nutritionnelle et les formes sous lesquelles il peut se trouver dans notre quotidien, que ce soit sous forme alimentaire ou non alimentaire. Suivent ensuite les deux principaux chapitres : tout d’abord, un chapitre relatif aux aspects médicaux de l’allergie à l’arachide.
L’arachide, Arachis hypogaea, est une légumineuse riche en protéines (30%). On la retrouve un peu partout dans notre alimentation mais également dans de nombreux produits non alimentaires tels que les cosmétiques et les denrées pour animaux de compagnie.
L’allergie à l’arachide est une allergie de type I caractérisée par deux phases, une précoce et une tardive, cette dernière pouvant avoir lieu plusieurs heures après la première. Cette allergie survient plus fréquemment chez les enfants, bien qu’elle existe également chez l’adulte. Les conséquences sont d’ailleurs plus sévères chez l’adulte que chez l’enfant. Il s’agit d’une allergie persistante : seuls 20% des enfants développent une tolérance en grandissant. Onze allergènes ont été identifiés, parmi lesquels 4 sont considérés comme des allergènes majeurs. Il s’agit des allergènes Ara h 1, 2, 3 et 6. En ce qui concerne la sensibilisation à l’allergène via l’alimentation de la mère (grossesse et allaitement), aucune étude n’a jusqu’à présent pu prouver scientifiquement une relation avec la prévalence de l’allergie à l’arachide.
Les données de prévalence varient d’une étude à l’autre : certaines études affirment qu’elle est en augmentation ces dernières années, alors que d’autres parlent de stagnation. Par ailleurs, la plupart des études portent sur les enfants et peu de données sont disponibles concernant les adultes. Etant donné les différences méthodologiques constatées pour l’obtention des résultats, il est difficile de pouvoir tirer des conclusions. Il semble toutefois qu’elle avoisine les 1%. Le problème est semblable en ce qui concerne la détermination des doses réactogènes. Les méthodes utilisées, les populations testées, les doses administrées, etc. sont des facteurs qui varient beaucoup d’un protocole à l’autre, rendant les comparaisons entre résultats difficiles. De plus, étant donné les risques sévères liés à cette allergie, on ne peut tester les patients susceptibles de présenter une réaction anaphylactique. Ainsi, les doses les plus faibles enregistrées peuvent varier fortement d’un support à l’autre (farine d’arachide, protéines, cacahuètes entières). Il est donc actuellement impossible de définir une dose exacte pour la population.
Au niveau des manifestations, il s’agit d’une des allergies les plus sévères. Elle touche plusieurs systèmes (respiratoire, cutané, cardio-vasculaire, digestif, etc) et peut entraîner une réaction anaphylactique menant parfois au décès. Les symptômes les plus couramment constatés sont cutanés. Le gold standard du diagnostic de l’allergie est le test de provocation. Il est cependant plus long, plus cher et plus risqué pour les patients que les prick tests ou le dosage des IgE spécifiques, qui ont par contre une valeur prédictive positive plus faible. Mais quelle que soit la méthode utilisée, il est indispensable de récolter l’histoire clinique du patient. La prise en charge du patient allergique à l’arachide repose encore actuellement sur l’éviction totale de l’allergène, se traduisant par un régime alimentaire souvent très strict. Ce traitement est cependant de plus en plus discuté au vu de la balance bénéfice-risque d’un tel régime. La plupart des auteurs recommandent de l’adapter au cas par cas afin de réduire au maximum la difficulté d’un régime aussi strict et de réduire son impact sur la qualité de vie du patient. Le traitement d’urgence de la réaction anaphylactique est l’administration d’une injection d’épinéphrine (deux injections sont parfois nécessaires), le plus rapidement possible dès l’apparition des symptômes. Il peut être associé à des corticostéroïdes et des antihistaminiques. Le patient devra rester plusieurs heures en observation dans une structure médicale adaptée, à cause du risque de réaction biphasique. Une seconde réaction peut en effet survenir plusieurs heures après la réaction initiale.
L’allergie à l’arachide peut présenter des réactions croisées avec le lupin, le soja, les pois, les aliments de la famille des fruits à coque, ainsi que le pollen de bouleau. Certains cas de réactions croisées ont également été constatés entre l’arachide et les graines d’agrumes.
Les procédés technologiques influencent l’allergénicité de l’arachide. Tout d’abord, au niveau du grillage des graines. Il a en effet été démontré que ce procédé augmente fortement le pouvoir allergénique des graines d’arachide, ce qui n’est pas le cas de la friture ou lorsqu’elles sont bouillies. L’allergénicité est réduite sous l’action d’autres procédés, tels l’action d’acides, d’ions, de champs électriques ou encore d’enzymes. Aussi, le potentiel allergénique des huiles est influencé par les procédés : l’huile d’arachide raffinée semble être à moindre risque pour les personnes allergiques, car elle ne contient –presque- plus de résidus protéiques. Par contre, ce n’est pas le cas pour l’huile brute ou l’huile pressée à froid, qui contient encore une certaine quantité de protéines, suffisante pour induire une réaction chez les patients sensibles. La prudence reste recommandée chez tous les patients allergiques à l’arachide.
L’arachide fait partie des substances à déclaration obligatoire en matière d’étiquetage alimentaire. La législation a cependant ses limites, par exemple en ce qui concerne les denrées non préemballées. Par ailleurs, rien n’y est mentionné à propos de la procédure à suivre en cas de risque de contamination croisée.
Enfin, le dernier chapitre de ce dossier concernait l’impact de l’allergie à l’arachide sur la qualité de vie des patients. Les résultats montrent que cet impact est assez important, non seulement pour les patients eux-mêmes, mais également pour leurs proches et leur entourage.