L’allergie alimentaire aux mollusques

On dénombre aujourd’hui 8 classes de mollusques qui diffèrent beaucoup les unes des autres et dont 3 sont particulièrement importantes. Il s’agit des bivalves (moules, coques, huîtres, pétoncles, …), des céphalopodes (poulpe, calamar, seiche, …) et des gastéropodes (escargots, bigorneaux, ormeaux, …) (Bruce J. et al., 2006 ; Grassé P.-P. & Doumenc D., 2000).

Les produits de la mer, dont les mollusques font partie, sont de plus en plus consommés à travers le monde, notamment en raison de leurs qualités nutritionnelles. Ils ont notamment, selon l’espèce, la saison et la région d’élevage, des teneurs intéressantes en acides gras essentiels (EPA, DHA), de la vitamine B12, du potassium, de l’iode, du zinc, du fer (Anses, 2010). Cette consommation élevée est accompagnée d’une augmentation des cas d’allergie parmi les consommateurs (Kamath S.D., 2014).

Les mollusques se trouvent parmi les 14 substances à déclaration obligatoire en cas de présence dans les denrées alimentaires préemballées ou non. Ils provoquent des allergies qui persistent généralement à l’âge adulte (Lopata A.L. et al., 2016). L’allergie aux mollusques est assez rare quoique généralement plus élevée dans les pays de grande consommation, notamment parmi la population asiatique dont les habitudes alimentaires incluent la consommation importante de fruits de mer (Lopata A.L. et al., 2016). L’allergie aux fruits de mer (mollusques et crustacés) est estimée entre ≤ 0,5% (Tsabouri S. et al., 2012) et 0,6% de la population mondiale (Leung N.Y.H. et al., 2015). Les adultes semblent être plus touchés par l’allergie aux fruits de mer que les enfants (Kamath S.D., 2014).

L’allergène majeur des mollusques est la tropomyosine (Emoto A. et al., 2009), commune à toutes les espèces de fruits de mer (donc aux crustacés également). Plus de 60% des personnes allergiques aux fruits de mer réagissent à cette protéine musculaire, et souvent de façon sévère (Lopata A.L. et al., 2016). Cette protéine est un panallergène chez les invertébrés, mais ne semble pas être allergisante chez les vertébrés (Pedrosa M. et al., 2014). Elle est hydrosoluble, thermostable, et possède de nombreuses isoformes (EFSA, 2006). Les mollusques comportent d’autres allergènes : la chaîne lourde de la myosine (escargot), l’arginine-kinase (calamar), l’amylase, la paramyosine (ormeau, escargot de mer, moule et calamar), la triosephosphate isomérase (poulpe) et l’actine (Woo C.K. & Bahna S.L., 2011 ; EFSA, 2006 ; Yang Y. et al., 2017 ; Pedrosa M.  et al., 2014 ; Misnan R. et al., 2016 ; Kamath S.D., 2014 ; Yang Y. et al., 2017). L’arginine kinase est sensible à la chaleur, l’acidité et l’alcalinité (Pedrosa M. et al., 2014). L’actine et l’arginine kinase que l’escargot contient sont toutes deux thermolabiles (Misnan R. et al., 2016).

Il existe différentes voies d’exposition aux allergènes des mollusques. La plus fréquente est l’ingestion de mollusques. On peut aussi observer des allergies cutanées (urticaire) et respiratoires (asthme), notamment lorsque la personne est allergique aux acariens. Une exposition (cutanée et/ou respiratoire) au cours du traitement des mollusques en entreprise (allergie professionnelle due à la production de bio-aérosols) et l’environnement domestique (ex. cuisson à la vapeur) peuvent aussi provoquer une sensibilisation (Lopata A.L. et al., 2016 ; EFSA, 2006 ; Ljubojevi´c Hadžavdi´c S. et al., 2016).

Concernant les réactions, elles sont généralement immédiates (gastro-intestinales, cutanées ou respiratoires). Les fruits de mer (mollusques et crustacés) sont jugés être les plus déclencheurs de réactions chez les adultes. Ce sont des allergies persistantes avec un risque élevé d’anaphylaxie (Kamath S.D., 2014). On peut classer les manifestations cliniques en 5 groupes : l’anaphylaxie (réactions généralisées) induite ou non par l’effort, les réactions respiratoires (asthme, rhinite), cutanées (urticaire, dermatite atopique), gastro-intestinales (douleurs abdominales, nausées, vomissements, diarrhée) et les autres réactions comme la conjonctivite ou le syndrome oral d’allergie (Kamath S.D., 2014).

Il existe des réactions croisées entre les différents mollusques, entre mollusques et crustacés et entre mollusques et insectes ou parasites (acariens, cafards, helminthes) (EFSA, 2006 ; Emoto A. et al., 2009 ; Pedrosa M. et al., 2014 ; Leung N.Y.H. et al., 2016).

Pour ce qui est du diagnostic, il est très important de déterminer au départ si les réactions sont provoquées par une allergie ou par une intoxication, voire une intolérance (Woo C.K. & Bahna S.L., 2011). Le diagnostic de l’allergie se base sur l’histoire clinique, des tests de sensibilisation (recherche d’IgE spécifiques ; tests cutanés avec le même aliment impliqué de préférence (prick-prick) car les extraits commerciaux peuvent donner de faux négatifs), et des tests de provocation orale si nécessaire (à l’aveugle, et contrôlés par placebo de préférence) (Lopata A.L. et al., 2016 ; Woo C.K. & Bahna S.L., 2011 ; Pedrosa M. et al., 2014).

La prise en charge nécessite une éviction stricte du ou des aliment(s) impliqué(s). Les patients souffrant de réactions sévères devraient disposer d’un stylo auto-injecteur d’épinéphrine (Woo C.K. & Bahna S.L., 2011). Les réactions par inhalation aux vapeurs de cuisson étant fréquentes pour les allergies aux fruits de mer, il sera souvent conseillé aux patients d’éviter ces vapeurs, ainsi que le contact indirect (Pedrosa M.  et al., 2014). L’immunothérapie orale ou sublinguale n’est pas une piste actuellement (Woo C.K. & Bahna S.L., 2011).

Les mollusques peuvent aussi provoquer d’autres types de réactions défavorables (non allergiques) : des syndromes toxiques (intoxications paralysante, neurologique, amnésiante, diarrhéique, intoxication par des azaspiracides), ainsi que des réactions d’origine virale ou bactérienne (Woo C.K. & Bahna S.L., 2011).   

Pour plus d'informations :

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